Les yôkai de la mer intérieure de Seto 瀬戸内海の妖怪
Effrayantes créatures
Démons, fantômes et esprits ; batailles historiques dantesques ; pirates et valeureux guerriers, mythes et folklore japonais... La mer intérieure de Seto est au cœur de nombreuses légendes, célèbres dans tout l'archipel. En quatre chapitres, Vivre le Japon vous fait découvrir ces histoires extraordinaires. Pour terminer ce voyage, explorons les histoires effrayantes des yôkai de la mer intérieure de Seto.
Nurarihyon
A la nuit tombée, affairé dans votre maison à préparer le repas, peut-être n'avez-vous pas remarqué le drôle de vieillard qui a pris place autour de la table familiale. Il fume votre tabac et boit votre thé comme si votre maison était la sienne. Et le plus étrange, c'est que cela ne vous gêne aucunement. Il existe une bonne raison à cela : vous êtes sous l'emprise du nurarihyon !
Ce yokai dont le nom signifie littéralement "gourde glissante" est une créature extrêmement puissante. Le nurarihyon est en effet considéré comme le commandant suprême de tous les yokai. C'est lui qui prend la tête du défilé nocturne des cent démons, le Hyakki Yokô, dans les rues de l'archipel.
Et pourtant de par son apparence, le nurarihyon ne vous glace pas d'effroi au premier regard. Sous l'apparence d'un vieil homme, ce yokai porte des tenues élégantes (un kimono de soie ou une robe de moine bouddhiste appelée kesa) et se déplace exclusivement en palanquin porté par des serviteurs.
Appréciant les mets délicats et luxueux, il se plait à se glisser à l'intérieur des demeures cossues pour en profiter à son aise.
En y regardant de plus près, un détail finit par attirer votre attention. Sa tête semble bien trop grande pour ce petit corps frêle. Et pour cause ; celle-ci très allongée et disproportionnée ressemble à une grosse gourde ! Mais lorsque vous croisez son regard, le frisson vous gagne. Sous les traits ridés, son visage tient tout à la fois du vieillard et du poisson-chat !
À Okayama, le nurarihyon se présente sous une forme différente. Dans cette version locale, il s'agit d'une créature marine entièrement ronde flottant dans les eaux de la mer intérieure de Seto. Il se joue des pêcheurs qui tentent de s'emparer de lui en s’enfonçant dans l'eau dès que quelqu'un s'approche d'un peu trop près. Certains de ces globes auraient ensuite migré sur terre pour devenir le nurarihyon tel que l'on le connait traditionnellement.
Umibozu
Les umi-bozu, moines de la mer, sont de terrifiantes créatures marines à la peau noire que les bateaux cherchent par dessus tout à éviter.
Ils sont les esprits de moines jetés à la mer par une population en colère. Cette fin atroce a fait d'eux des fantômes cherchant à se venger des hommes.
L'umi-bozu s'attaque aux navires qui ont le malheur de croiser son chemin. Son apparition en mer entraine le déchainement des eaux et des cieux ; venant mettre ainsi un terme à la nuit calme.
Décrit tantôt comme étant de la taille d'un navire, tantôt comme un géant dont seule la tête émerge des eaux, l'umi-bozu est gigantesque. Tout est ensuite question d'appréciation ! Il peut en tout cas détruire un navire en un seul coup surpuissant.
Parfois d'humeur plus facétieuse, il peut choisir d'utiliser un baril pour déverser de l'eau en très grande quantité sur le bateau et son équipage. Mais à ceci, l'homme a trouvé une parade en fournissant à l'umi-bozu un tonneau sans fond. Le yôkai aura beau écoper sans relâche, il ne sera jamais en mesure de noyer les marins à bord.
Funayûrei
Les funayūrei sont eux-aussi les fantômes vengeurs de personnes disparues en mer qui, portés par une amère rancune envers les vivants, tentent de faire couler les bateaux. Ils seraient les esprits de marins disparus souhaitant entrainer leurs anciens camarades dans les profondeurs avec eux. Pour ce faire, ils remplissent les navires d'eau à l'aide d'une louche en bambou, l'hishaku.
Les funayūrei apparaissent surtout durant les nuits de mauvais temps lorsque les navires affrontent le vent, le brouillard et la pluie. Souvent décrits comme des formes spectrales blanches, ils peuvent aussi se présenter sous l'apparence de flammes. On raconte que dans les temps anciens certains vaisseaux naviguaient avec à leur bord des hishaku percés de trous pour empêcher les funayūrei d'accomplir leur funeste dessein et les éloigner.
Gashadokuro
Si vous entendez derrière vous le "Gachi gachi", à savoir le bruit du claquement des dents et des os du gashadokuro, il est déjà trop tard. Ce squelette géant s'abat déjà sur vous, prêt à vous broyer entre ses mains ou à vous mordre la tête. Gloups !
Originaire d'Hiroshima, le gashadokuro ou squelette affamé, erre la nuit dans les campagnes voisines de la mer intérieure de Seto. Il est formé des ossements de centaines de guerriers morts laissés à l'abandon sur un champ de bataille. Sans sépultures, leurs âmes se remplissent de douleur, de colère et de rancune et s'unissent pour se venger des hommes.
La plus célèbre histoire de gashadokuro est vieille de 1000 ans. Immortalisée par le maître de l'ukiyo-e Kuniyoshi, elle conte comment la sorcière Takiyasha-hime aurait invoqué un gashadokuro pour attaquer la ville de Kyoto et venger la mort de son père.
Ushi-oni
S'il est un yokai effrayant, c'est bien l'ushi oni. Surnommé la terreur de l'ouest, ce yokai originaire de la préfecture d'Ehime est particulièrement sauvage et cruel. Cependant, la ville d'Uwashima le célèbre tous les ans en organisant à la fin du mois de juillet le festival Uwashima Ushi-oni au cours duquel l'ushi-oni est figuré et mis en mouvement par plusieurs danseurs.
Carnivore, l'ushi-oni, ou boeuf-démon, est friand de chair humaine et aime chasser ses proies le long des côtes de la mer intérieure de Seto. Son apparence hybride pourrait être le résultat d'une terrible expérience. Il dispose d'une tête de bœuf cernée de cornes et d'un corps d'araignée dont les longues pattes se terminent par de longues griffes. On le décrit parfois différemment : un corps de bovin avec une tête d'oni ou une tête de bœuf sur un corps humain. Il peut injecter à ses victimes un poison toxique qui entraine de terribles souffrances.
Il s'allie parfois avec d'autres yokai comme les mure-onna ou iso-onna, qui attirent les hommes au bord de l'eau par leurs charmes. Une fois sur la plage, ces pauvres malheureux sont alors perdus. L'ushi-oni se jette sauvagement sur sa victime et plante ses crocs acérés dans sa chair. La suite est plus joyeuse ; enfin pour les yokai puisque l'histoire se termine par un repas convivial entre démons autour des restes de l'homme abusé !
Pour aller plus loin :
- La mer intérieure de Seto
- Triennale de Setouchi 2019
- Comment se déplacer lors de la Triennale de Setouchi ?
- La piste cyclable Shimanami Kaido
- La région de Setouchi
- L'île de Naoshima
- L'île de Teshima
- L'île de Shôdoshima
- L'île de Inujima
- L'île de Honjima
- L'île d'Ibukijima
- L'île d'Awashima
- L'île de Shamijima
- L'île de Takamijima
- L’île d’Ogijima
- L'île de Megijima
- La ville de Takamatsu
- Le port d'Uno
- Le temple Kosan-ji
- Les mythes des îles de la mer intérieure de Seto
- Batailles et légendes dans la mer intérieure de Seto
- Pirates et combattants de la mer intérieure de Seto
- Les yôkai de la mer intérieure de Seto
- Les oeuvres d'art en plein-air de Naoshima