Les fantômes de Matsue 松江の幽霊
Sueurs froides
Des traces de sang qui ne s'effacent jamais, des personnesenterrées vivantes dans les fondations des édifices, une grotte abritant lesâmes d’enfants décédés, une tortue de pierre géante prenant vie pour dévorerles habitants… Bienvenue à Matsue !
Chair de poule
Malgré tous vos efforts, vous n’arrivez pas à maîtriser letremblement de votre main… Votre lampe torche vacille dans l’obscurité. Lesouffle court, vous sentez votre cœur cogner dans votre poitrine. Pourêtre honnête, vous êtes prêt(e) à déguerpir à la moindre occasion. Cettequestion qui vous revient sans cesse : "Mais qu’est-ce que je fais là ?" Quand l’office de tourisme de Matsue vous a informé(e) de la tenue d’unevisite guidée thématique sur les fantômes de la ville, ça vous semblaitpourtant être une bonne idée. Et vous voilà arpentant les rues de la ville dansla nuit noire... Rassurez-vous, bien que les fantômes de Matsue soientnombreux, vous ne risquez rien ! Lafcadio Hearn alias Yakumo Koizumi,auteur irlandais naturalisé japonais, ne s'y est pas trompé en recueillant etcompilant de nombreuses histoires fantastiques de la cité dans plusieurs de seslivres. C'est d'ailleurs dans sarésidence de Matsue qu'il commence la rédaction de "Kwaidan" ou "Histoires etétudes de choses étranges". C'est à Bon Koizumi, arrière-petit fils de Hearn, quel’on doit ces visites sur les traces des fantômes de la ville. Depuis 2008, cesvisites (uniquement en japonais), organisées avec l'aide de l’office detourisme, ont lieu à la nuit tombée en petit groupe de dix personnes et à lalampe torche. Petit tour d'horizon des fantômes de Matsue !
Mieux vaut oublier les paroles
À Matsue, l'interdiction de chanter sur le pont Azuki-bashi, situé devant le temple Fumon-in (au nord-est du château) était depuis tout temps respecté sous peine de déclencher le courroux d'une femme hantant le pont. Pourtant, un soir, un samouraï brave l'interdit avec effronterie. Ne constatant aucune calamité d'aucune sorte, il se met à rire de bon cœur et rentre dans son foyer. Une servante l'attend sur le pas de sa porte. Arrivé à sa hauteur, celle-ci lui tend une boîte qu'elle dit être un cadeau de la part de sa maîtresse. En l'ouvrant, le samouraï fait une découverte macabre : une tête ensanglantée ! À l'intérieur de la maison, repose le corps de son enfant... sans tête.
La mère nourricière du Daio-ji
À proximité du Daio-ji, une femme se rendait chaque soir dans un magasin pour y acheter des bonbons. Intrigué par la dame au teint pâle et à la silhouette très amaigrie, le propriétaire de l'échoppe se décide à la suivre après son achat quotidien. La femme se dirige vers le cimetière du temple. En entrant dans celui-ci, l'homme entend distinctement les pleurs d'un bébé. Les cris se faisant très forts près d'une tombe, il se met à creuser et découvre un bébé près duquel sont déposés quelques bonbons. La jeune femme enterrée vivante aurait donné naissance à son enfant dans la tombe. Son fantôme se rendait chaque soir à la boutique pour acquérir de quoi nourrir son enfant. Une histoire similaire est contée dans le quartier d'Higashiyama à Kyoto.
La tortue du Gessho-ji
Le Gessho-ji abrite les sépultures du clan Matsudaira, des seigneurs qui régnèrent sur la ville entre 1638 et 1871. Une imposante tortue de pierre veille sur la tombe de Matsudaira Murenobu, 6è seigneur du clan. Mais celle-ci prend vie une fois la nuit venue, terrifiant et dévorant les habitants. Le moine du temple, par une prière intense, fait tomber du ciel un pilier de pierre sur son dos pour l'immobiliser pour l'éternité.
Voir aussi : Le temple Gessho-ji
Un sacrifice pour un bel édifice !
Plusieurs histoires de « piliers humains » sont particulièrement célèbres à Matsue. Sachez que dans la pratique du hitobashira, en vigueur du IVè au XVIè siècle dans tout l’archipel, des personnes étaient enterrées vivantes sous un édifice en construction, afin de le préserver d’une future catastrophe naturelle ou d'une attaque. Lors de la construction du château, une jeune fille aimant danser est ainsi sacrifiée dans les fondations. Suite à cela, les jeunes filles reçoivent l’ordre de ne pas danser dans les rues de la ville pour ne pas mettre en colère le fantôme de la jeune danseuse. À la moindre petite danse, tout le château se mettait à trembler !
Un homme prénommé Gensuke est lui sacrifié lors de l’édification du pont Matsue Ohashi pour apaiser les esprits de la rivière qui détruisent systématiquement les travaux en cours. Il est enterré vivant dans le lit de la rivière sous le pilier central du pont, surnommé par la suite Gensuke-bashira. C’est parce qu’il est le premier à passer dans la rue en portant un type particulier de hakama que Gensuke est désigné. De ce sacrifice découle une bien curieuse coutume à Matsue ; celle de toujours boire deux tasses de thé. La légende raconte que le matin de sa mort, Gensuke, se hâtant de partir travailler, a refusé de boire une seconde tasse de thé. Une décision lourde de conséquence qui fit de lui le premier à se présenter.
Attention à la marche
Une geisha prénommée Matsukaze est un soir importunée par un samouraï. Celle-ci refuse ses avances insistantes et tente de s'éloigner. Ivre de rage, l'homme lui assène un coup d'épée. Matzukaze fuit en direction du temple Seikoin tout proche où elle espère trouver refuge. Mais l'homme la rattrape dans les escaliers du temple et lui porte le coup fatal. Malgré les nombreux nettoyages, les traces de sang de la geisha ne s'effacèrent jamais des marches. Si vous entonnez une petite chanson dans les escaliers, Matzukaze vous apparaitra. Pour les curieux, les marches maculées du sang de la pauvre Matsukaze sont installées à la devanture de l'un des bâtiments du Seikoin !
Vers le monde des défunts
L'entrée du "Royaume des Morts" serait à Matsue ! C’est précisément à Higashizumo au sud-est de la ville que se situe le yomotsuhirasaka, le passage entre le monde des vivants et celui des défunts appelé Yomi ; un passage matérialisé par de gros rochers. L’histoire du yomotsuhirasaka puise sa source dans l’histoire d’Inazami et Izanagi, les kami co-créateurs du monde. Lorsqu’Izanami décède en donnant naissance au kami du feu, Izanagi décide de la retrouver au royaume des morts. Mais il est horrifié en l’y trouvant monstrueusement défigurée. Il s’enfuit, poursuivi par la jeune femme humiliée et furieuse. Izanagi parvient à quitter Yomi et condamne l’accès par une énorme pierre.
Les grottes mystérieuses
Au nord de Matsue, les grottes Kaka-no-Kukedo, accessibles uniquement en bateau entre mars et novembre, sont le lieu d’autres histoires fantastiques. L’une des grottes est connue pour abriter les âmes d’enfants décédés. De nombreux jizo disposés au sol sont entretenus par leurs parents. Hearn raconte que de la paroi s’écoule un filet de liquide blanc ; la légendaire fontaine de lait où viennent boire les enfants. Les petites tours faites de cailloux superposés sont l’œuvre des enfants qui les édifient la nuit ; Hearn en tient pour preuve les petites empreintes de pas sur le sol de la grotte. Brrrrr !
Lire aussi : La grotte Genbudo
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+81 852 23-5470Prix
Visite guidée à partir de 1 500 yen (11€35)